Réseaux Rivières : garder le cap de la restauration écologique
L’Agence de l’Eau Artois-Picardie et les Réseaux Rivières ont co-organisé, en partenariat avec le Centre de ressources “cours d’eau” de l’Office Français de la Biodiversité (OFB) et l’Agence Régionale de la Biodiversité Hauts-de-France ( ARB HdF) , un colloque national consacré à la restauration écologique des rivières les 15,16 et 17 septembre 2025.
Pendant trois jours, près de 200 techniciens de rivière et acteurs de la GEMAPI (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations), venus de toute la France, se sont réunis à Arras pour partager leurs expériences, leurs connaissances et leurs perspectives en matière de préservation et de gestion durable des milieux aquatiques.
Au programme : des séances plénières, des ateliers thématiques, des visites de terrain autour de quatre axes thématiques : le gouvernail, la boussole, les courants contraires et le cap, mêlant réflexions stratégiques et immersions pratiques.
Jour 1 : plénière inaugurale
La première journée a été ouverte par Frédéric Leturque, président de la Communauté urbaine d’Arras, suivi par Édouard Gayet, directeur départemental des territoires et de la mer du Pas-de-Calais, qui a rappelé le contexte des inondations de l’hiver 2023-2024 et souligné l’importance de replacer les rivières au cœur de l’aménagement des territoires.

Stéphane Jourdan, expert au sein du service Expertise, écosystème et nouveaux enjeux (SEENE) de l’Agence de l’Eau Artois-Picardie a ensuite présenté les grands enjeux de cette rencontre, conçue comme un appui concret aux techniciens de rivière, dans un métier en pleine mutation.
Dans le prolongement, Gérald Duhayon, coordinateur de l’Agence régionale de la Biodiversité Hauts-de-France (ARB-HDF) a présenté le rôle de l’ARB de cette structure dans l’accompagnement des collectivités et des gestionnaires de cours d’eau.
À la tête de l’Office français de la biodiversité, Olivier Thibault a livré une vision d’ensemble des défis que la restauration écologique doit relever face au changement climatique et à la nécessaire préservation de la biodiversité.
La plénière d’ouverture s'est conclue par l’intervention d’André Flajolet, président du Comité de bassin Artois-Picardie, qui a rappelé l’importance de la concertation de l’ensemble des acteurs dans la préservation des milieux aquatiques.
L’après-midi s’est poursuivie par une table-ronde nourrie, au cours de laquelle plusieurs intervenants ont partagé leurs travaux et témoignages :
Nicolas Valé, directeur adjoint de l’Association Rivière Rhône-Alpes Auvergne et Hervé Caltran, responsable de l’unité de Gestion des patrimoines à la Métropole de Lyon et élu de l’association, ont conjointement présenté leur étude nationale sur les métiers de la gestion des milieux aquatiques dans la fonction publique ÉTUDE : Les métiers de la gestion des milieux aquatiques dans la fonction publique | Association Rivière Rhône-Alpes Auvergne - ARRA²) et dressé le profil type du technicien de rivière. (+ itw Nicolas Valé “Que retenez-vous de ces trois jours ?” + ppt ARRA²)
Nathalie Sureau-Blanchet, sociologue de l’environnement à l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée et Corse sur la perception des rivières a quant à elle exposé ses travaux de recherche sur la perception et les usages des rivières par les habitants et les acteurs du territoire. (+ itw NSB “quelle perception les citoyens ont-ils des enjeux de la restauration écologique + PPT NSB + lien étude : livret_rex_lodeve_vf.pdf)
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Josée Peress, chargée de mission “restauration écologique” à l’Office Français de la Biodiversité a présenté à l’auditoire le Centre de ressources “cours d’eau” dont l’objectif est de favoriser le partage de bonnes pratiques et le transfert de connaissances. (+ lien vers le centre de ressources : Centre de ressources Cours d'eau | Le portail technique de l'OFB) + photo J PERESS
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Et Jean-François Landel, inspecteur au sein de l’Inspection Générale de l’Environnement et du Développement Durable (IGEDD) a évoqué le rapport de simplification du cadre législatif et réglementaire applicable aux cours d’eau, publié en mai 2024 : Mission de simplification du cadre législatif et réglementaire applicable à l’entretien des cours d’eau|Rapports publiés de l' IGEDD
Ce rapport propose de simplifier le régime juridique des cours d’eau et de recourir à des dispositifs d’urgence pour une gestion plus efficace face aux crues exceptionnelles telles que celles subies dans le Pas-de-Calais durant l’hiver 2023-2024.
Ce rapport démontre par ailleurs que ces inondations exceptionnelles ne peuvent pas être imputées à un quelconque manque d’entretien des cours d’eau.
photo JF Landel
Jour 2 : visites de terrain et première session d’ateliers thématiques
La deuxième journée a été consacrée à six visites de terrain organisées dans le bassin Artois-Picardie, illustrant la diversité des actions menées :
La Hem : Travaux de contournement d'un ouvrage hydraulique menés avec l'EPF et apports des travaux d'hydraulique douce et d'une agriculture de conservation des sols sur l'amont du bassin versant.
L' Aa : Découverte d'une zone humide de plus de 4 ha et prévention du colmatage du cours d'eau.
La Scarpe : Ouvrage technique de franchissement au droit d'un seuil et renaturation de berges d'un cours d'eau et gestion conservatoire de milieux humides dans le cadre d'un plan de gestion.
La Selle : Travaux de reméandrage et suivi de l' efficacité technique d'un projet à multiples enjeux & Adhésion sociale à un projet de restauration écologique de cours d’eau.
La Canche : Remédandrage de cours d'eau et maitrise foncière & Ouvrage de rétention de crues - ralentissement dynamique
La Somme : Rétablissement des continuités dans le cadre du Plan Somme et du Plan Anguilles & évaluation piscicole & Gestion de berges en techniques végétales et traitement des EEE
Les participants ont ensuite poursuivi les échanges en salles, lors de sessions d’ateliers thématiques. Douze ateliers ont ainsi été proposés en fonction des 4 grands axes d’orientation :
Au gouvernail :
- Où et à quoi dois-je me former pour mieux naviguer ? Et mon élu ? (outils, thèmes et espaces de formation)
- Qui se bat pour que je monte à son bord ? (recrutement et attractivité d’une collectivité gemapienne)
- Comment partager la barre au mieux avec mon élu ? (le binôme élu-agent)
La boussole :
- Quels instruments de navigation ? (nouveaux outils de DIAG et de PRO)
- Comment bien exploiter mon multicoque ? (dialogue entre toutes les politiques publiques où l’eau est un enjeu)
- Comment être sûr d’avoir pris la meilleure route ? (Suivi scientifique minimal & co)
Les courants contraires :
- Comment contrer le chant des sirènes ? (contrer les “fake news”)
- Comment éviter les pirates ? (conflits/agressions sur le terrain)
- Comment embarquer les citoyens à mes côtés ? (gouvernance inclusive)
Le cap :
- Comment m’appuyer sur la police pour le pas dévier du cap de la DCE ? (outils réglementaires et soutien administratif)
- Comment utiliser le foncier pour atteindre le cap d’une restauration ambitieuse ? (outils et stratégie foncière)
- Comment bien établir ma carte au trésor ? (cahier des charges restauration)
Jour 3 : fin des ateliers et plénière de clôture
La troisième journée a été marquée par la restitution des ateliers. Les rapporteurs d’axe ont présenté une synthèse des échanges, illustrée par une fresque évolutive réalisée en direct par la facilitatrice graphique du SIILAB Stéphanie Denysenko. :
Le grand témoin de cette édition, le biophysicien et naturaliste Bill François, a rappelé avec force que « les techniciens de rivière sont d’une part les gardiens de la vérité scientifique de l’état des rivières et d’autres part, de la biodiversité de ce monde merveilleux, caché et indispensable que sont les cours d’eau. Ainsi que des créateurs de liens, entre les différents acteurs et le monde vivant, entre le grand public et le monde méconnu des rivières, des bâtisseurs de ponts entre le monde d’au-dessus et celui d’en dessous la surface. Ils travaillent au nom de l’utilité publique, celle des Français, celle des humains, mais aussi au nom de l’utilité publique du peuple de ce grand tout connecté, dont nous faisons partie nous-même, même si nous l’avons oublié”.
Enfin, Isabelle Matykowski, directrice générale de l’Agence de l’Eau Artois-Picardie a clôturé ce colloque en soulignant l’objectif central de cette rencontre nationale : répondre aux questions des techniciens de rivière, partager des retours d’expérience, en articulation étroite avec l’OFB et le centre de Ressources “Cours d’eau” ainsi que l’ensemble des réseaux locaux. “Il ne faut pas hésiter à regarder sous le miroir d’eau pour gérer et restaurer les rivières”, a-t-elle conclu.




